Lisbeth est... en pleine crise d'adolescence. Oui, encore à 17 ans.
La crise d'adolescence, vous savez, c'est cette période bien précise où les adolescents subissent des changements, autant au niveau physique que mental. Ils se remettent en question, font des choses qui paraissent absurdes aux autres. Certains se replis sur eux mêmes, d'autres, affirment leur existence en flirtant avec les limites, juste pour se prouver qu'ils existent bien réellement. Et dans le cas de Lisbeth, c'est précisément cela. La jeune fille semble folle et inconsciente de ses actes. Elle ne réfléchit pas ; elle agit. Jamais une seule question posée à son cerveau, jamais une remise en cause. Elle ne fait jamais la part des choses, dire que ça c'est bien et ça c'est mal car pour elle rien n'est mauvais, rien n'est bon. Les choses sont comme elles sont, pas besoin que chacun définisse si c'est bon ou mal. Elle fonce tout droit, dans le mur ou pas, quitte à faire des erreurs. Et tout cela dans l'unique but de prouver qu'elle existe et qu'elle est est maitresse de son corps ; elle veut montrer que personne à part elle ne peut agir sur son corps et son esprit.

Et ce comportement avec le monde extérieur se répercute aussi sur les gens qui l'entoure. Lisbeth n'est pas une gentille petite fille qui aide les grands mères à traverser les trottoirs. Lisbeth n'est pas la charmante voisine qui souhaite le bonjour à Monsieur Toutlemonde avec un gros sourire niais chaque matin. Non. Lisbeth, elle vous jauge sans crainte du regard, vous évalue et vous crache ensuite sur la gueule, pour finir par partir en trottinant gaiement. Elle n'a que faire du sentiment des autres face à son égard. Alors elle fait ce qu'elle veut, leur rit au nez ou se montre plus ou moins sympa avec eux, tout cela bien évidement, pour toujours et encore prouver qu'elle est maitresse de ses actes.
Cependant, il peut arriver que la demoiselle s'attache bien vite à certaines personnes. Et dans ce cas, les choses peuvent se compliquer pour elle. Tout d'abord, après vous avoir bien juger de son regard noisette, elle pourra vous adresser un sourire et commencera à vous parler. Elle vous proposera diverses choses, se montrera même un brin timide ou bien carrément trop extravertie, cela dépend du genre de personne que vous êtes. Mais si jamais vous commencez à montrer un peu d'affection pour elle, juste un peu d'amitié, Lisbeth se braquera et deviendra distante. Une seule parole un peu trop sincère suffira à ce qu'elle s'éloigne de vous et qu'elle ne vous reparle pas de la même façon, voir même plus du tout. Et pourquoi ? Elle ne veut pas qu'on s'attache à elle. Oui, c'est bien étrange car elle se permet elle même de s'attacher aux gens, mais pas l'inverse. La raison en est bien simple et les souvenirs y sont pour quelque chose. Ayant perdu son ami, ce garçon qui symbolisait sa nouvelle liberté, lors de l'explosion de la centrale, Lisbeth a souffert. Il est vrai qu'elle semble bien dans sa peau, à la voir courir et sauter, avec ce sourire inoubliable sur la face. Et il est vrai aussi qu'elle s'en remet peu à peu. Mais le simple fait que quelqu'un puisse lui témoigner un peu d'affection fait ressurgir en elle le souvenir du garçon. Alors elle se braque immédiatement et préfère tout stopper plutôt que de continuer et d'avoir peur de perdre cette personne. Cette chose la hante, et pour ne pas subir à nouveau une perte douloureuse, Lisbeth se créé un barrière autour d'elle qui est censée la protéger des peines.
Ce qui ne marche pas vraiment, à la longue.

« Attends... Attends... Maintenant ! »

Le jeune garçon s'élança en un saut après avoir chuchoté le signal à son amie. Celle ci, surprise et ébranlée par le stress, ne réagit pas immédiatement mais réussit, après quelques respirations effrénées, à bondir derrière son guide. Elle le suivit avec toute la peine du monde. Prise à la gorge par l'angoisse, elle arrivait à peine à respirer convenablement. Ses jambes tremblantes supportaient tant bien que mal son poids vacillant. Mais malgré sa peur, elle continua à courir, toujours plus vite, pour parvenir à rattraper le garçon. Celui ci s'était maintenant arrêté au pied d'un grillage qu'il toisa un moment avant de se retourner de nouveau, croisant le regard de celle qui l'accompagnait. Un fin sourire traversa son visage, juste assez pour rassurer un peu la fille. Il prit une grande inspiration et sauta sur le grillage, insérant ses doigts et ses pieds dans les trous, grimpa la clôture jusqu'en haut sans attendre la fille. Celle ci, toujours tenaillée par la peur, le regarda faire sans toute fois bouger, comme si elle était hypnotisée par la rapidité avec laquelle le jeune homme venait de sortir. Elle ouvrit de grands yeux et, face à l'insistance de son compagnon, elle dut se contraindre à monter elle aussi sur le grillage. Ses mains étaient moites, elle était essoufflée, mais elle réussit à se hisser en haut, finit par descendre en se ratant plus ou moins.

« C'est bon. On est dehors. »

Elle releva la tête vers le garçon. Ils venaient de s'enfuir de l'orphelinat. Ils venaient de quitter ce lieu de tristesse qu'ils côtoyaient depuis trop de temps à leur gout, ils venaient de se tendre aux bras de la douce liberté tant convoité. La fille ne se faisait pas à l'idée qu'elle était enfin sortit. Ses petits yeux noisettes étaient humides, elle haletait toujours, ne semblant toujours pas rassurée, même si leur excursion était une réussite. Mais son compagnon ne tressaillit pas, il sourit de nouveau, avec cette expression de bienfaisance trop encrée sur le visage. Ce qui réussit malgré tout à calmer la jeune fille.

« Lisbeth... Lisbeth ! C'est bon, on est dehors, on a réussit. »

Il prit son visage dans ses mains, dût se baisser un peu pour arriver à sa hauteur et ainsi plonger son regard azur dans le sien. Il sourit de plus belle et finit par l'envelopper dans ses bras, la rassurant avec toute l'affection qu'il semblait lui porter. La respiration de Lisbeth se calma et elle fut bien plus rassurée, comme si ce câlin pouvait la protéger de tout. Comme si, une fois près de ce garçon, plus rien ne pouvait lui arriver et qu'elle pouvait accomplir beaucoup de choses.

« Allez vient, on va découvrir ce que cette ville nous cache depuis si longtemps... »

Oui, ce garçon symbolisait sa nouvelle liberté.


C'est peu de temps après leur fuite que les deux adolescents se retrouvèrent en pleine ville. Tout leur semblait nouveau. Toutes ces lumières, tous ces gens, toutes ces voix, toutes ces choses qu'ils n'avaient pu voir que brièvement, et de jour, lors des sorties auxquelles ils avaient droit à l'orphelinat. Tout était magique. Lisbeth, son sourire retrouvé, dansait dans les rues en compagnie du garçon, laissait en permanence sa tête rivée sur les étoiles, ses cheveux bleus à la brise fraîche de la soirée, totalement hilare. Les passants se faisaient parfois bousculés par le jeune couple, grommelant quelques injures, certainement peu habitués à voir des gens s'extasier devant ces choses si banales. Mais les deux compagnons n'en avait que faire. Il jouait, il voguait dans cette nouvelle ville, cette chose qu'ils avaient tant attendu.
Ils se dirigèrent peu à peu vers le quartier animé de la ville. Un quartier qui proposait nombre de boites de nuits et bars, ce qui attira bien évidement les deux adolescents. Ils n'eurent pas de mal à entrer dans une boite de nuit, les gardes n'étant pas très futés, et se glissèrent parmi la foule. Ils s'adonnèrent alors à toutes les folies que l'on pouvait connaitre dans cet état d'inconscience ; ils burent, beaucoup d'ailleurs, rencontrèrent même des gens, dans un coin, qui leur proposèrent de goûter à quelques chose de planant. Inutile de vous dire ce que c'était, et aussi de vous compter à quel point les deux ado' aimèrent ce genre de consommation, n'y voyant absolument aucun danger...

Mais la suite ne viendra pas. Car ce fut, pour nos deux aventuriers et pour une bonne partie de ceux qui les entouraient, le chaos total. Le néant. Le trou noir. Sauf peut être pour Lisbeth qui elle, se souvint d'un genre de détonation, d'une déflagration, de quelque chose de puissant qui ne l'a pas alerté au départ - elle était droguée, en même temps - mais à laquelle elle a put échapper. Car le lendemain, c'est en se réveillant sous une planche de bois qui, fort heureusement, avait était bloquée par on-ne-sait-quoi, sous les gravas et la poussière que notre jeune adolescente se demanda ce qui s'était passé. Et la réponse ne tarda pas à venir à elle, lorsqu'elle sortit de la boite de nuit et qu'elle se retrouva, en plein jour, dans une sorte de fouillis, de bordel mêlant décombres et déchets, morceaux de tout et débris de pierres, ainsi qu'avec un horrible sentiment en elle qui grandit au fur et à mesure qu'elle découvrait les dégâts et surtout, qu'elle ne voyait pas son ami...

La Colère est un horrible sentiment qui nous conduit parfois à faire des choses regrettables. Cette chose prend le contrôle de votre être et vous donne une certaine force malsaine. Et chez Lisbeth, cette chose est totalement incontrôlable. La jeune fille, une fois prise par son Yacii, devient une toute autre personne. Son côté un peu libertin et léger s'efface pour laisser place à un côté sombre et violent. L'adolescente, complètement impuissante face à la force de ce sentiment, est capable d'user d'une force inconnue chez elle à l'état normal et d'une rare violence. Elle ne parlera plus, agira seulement avec des coups brutaux, révélant toute sa démence. Et elle ne s'arrêtera ni sous le coup de la fatigue ni sous celui de la douleur ; son sentiment ne s'efface qu'après plusieurs minutes, voir heures, tout cela dépend du taux de colère qu'elle a pu accumuler.

Mais quand est ce que ce sentiment se révèle t il chez la jeune fille ? D'ordinaire, elle ne s'énerve jamais grandement et passe sur les choses qui risqueraient de l'ennuyer. Cependant, ne pouvant tien contrôler, il se peut que son Yacii se manifeste après une minuscule accroche avec une personne ou, au contraire, après une longue altercation avec quelqu'un. Elle ne peut absolument rien prévoir et c'est ce qui l'effraie le plus.