Mistake. | Heather

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

La Résidence Majestic.

Un bâtiment grand, spacieux, et autrefois assez beau. De nos jours il arbore une façade décrépie, et des fissures. Certaines vitres sont cassées, et des briques manquent à l'appel. La pluie faisait couler la poussière accumulée dans les fissures. Je poussai la porte du hall d'entrée, et entrai. Il ne faisait pas très chaud, mais au moins j'étais à l'abri de l'orage. Des tags décoraient les murs, et de vieilles affiches à moitié déchirées recouvraient les quelques endroits épargnés par les tagueurs. La rampe d'escalier était peu stable, et valait mieux ne pas avoir besoin de d'appuyer dessus. Je préférai longer le mur plutôt que de risquer de tomber. Je n'avais pas besoin de ça. J'étais bien assez amochée. Et cette fatigue qui continuai à me ralentir, et ce rythme cardiaque qui refusait de se calmer.

La correction que Lewis m'avait infligée était ... musclée. Mon orgueil pulvérisé était éparpillé dans la Skyline, irrécupérable. Quand je passai devant une vitre, mon reflet me térrorisait. J'étais affreuse. Des hématomes qui s'étendaient sur mes paupières inférieures, un oeil gonflé, une coupure sur la joue et un mouchoir que je pressais à la base de mon nez. Malgré la douleur. Et ce qui frappait, c'était ma paleur cadavérique. Je n'étais pas très belle à voir.

Je gravis les escaliers avec une lenteur affligente. On aurait dit une petite vieille. J'étais dans un état lamentable. Oeil au beurre noir, nez cassé, pâleur de cadavre, coupures diverses. Sept escaliers me séparaient de la chambre 707, antre d'Ezio et Heather. Qu'allais pouvoir raconter? Que j'étais partie pour casser la tronche de Lewis, et que c'était moi qui avait morflé? Qu'en me battant j'étais parvenue à m'infliger trois blessures, et pas des moins graves? Mon histoire était à dormir debout, et surtout, surtout, je m'étais faîte courir de gros risques. Comme une andouille. Comme la sotte Yacii que j'étais. Je traversai le couloir, et m'arrêtai devant la porte de la chambre 707. Et frappai trois coups. Un pour ma connerie, un pour ma frustration, et un pour le sale quart d'heure que j'allais passer.

Messages : 340 Date d'inscription : 30/12/2010 Age : 30 Pseudo : Ninetales

- Toc, toc, toc.
  
  Trois coups très simples, qui sortirent Heather de sa lecture en italien. Posant son roman sur son lit, elle se leva en laissant échapper un bâillement, puis se dirigea vers la porte en jetant au passage un regard à Ezio. Ce dernier, ses lunettes sur le nez, était assis sur le canapé, occupé à nettoyer les différentes parties de son arme, actuellement en mode nomenclature. La mafieuse tourna la clé dans la serrure désormais réparée, ouvrit le panneau de bois...et étouffa un cri de surprise mêlée d'horreur. Treize.
  
  Oui, c'était bien la petite amie d'Ezio qui se traînait dans une flaque de sang, le nez brisé, un oeil au beurre noir, couverte d'hématomes et de diverses coupures. De plus, elle tenait à peine debout et était d'une pâleur alarmante. Probablement attiré par le couinement d'Heather, l'italien aux cheveux noirs se leva de son siège pour rejoindre l'entrée...et vacilla un instant, se raccrochant à l'épaule de son amie aux yeux de glace. What. The. Fuck. Que faisait-elle dans cet état ? Choqué, le mafieux ne parvint pas à dire la moindre chose, aussi fut-ce la thergal aux cheveux sombres qui agit.
  
  Heather passa un bras de Treize sur son épaule, jusqu'à l'amener sur le lit d'Ezio, dans la chambre 706. Le passage du rideau fut un peu compliqué, mais finalement fut réussi. La mafieuse assit la yacii sur les draps, et alla chercher la boite à pharmacie. Alors qu'elle sortait des compresses, de l'alcool et une bonne quantité de bandages et pansements, Ezio prit une chaise et fixa ses yeux bordeaux sur sa petite-amie. D'une voix tremblante, il lui posa la question qui lui brûlait les lèvres.
  
  "Comment...tu t'es...faite ça...?"
  
  L'air légèrement halluciné.

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

Heather couina. Pour la première fois de ma vie sans doute, j'entendais Heather, la mafieuse aux yeux de glace, au sang froid inégalé ... couiner. Ezio arriva derrière elle, et vacilla. Etais-je aussi affreuse? Ezio était stupéfait, et ne parvint pas à bouger, à sortir de sa torpeur. J'avais honte. Honte qu'il soit stupéfait comme ça, alors que c'étais de ma faute. Je me sentais affreusement mal. Heather fut la première à bouger, et à m'installer sur le lit de mon petit ami. Ezio s'installa sur une chaise, et demanda, l'air ... ahuri.

"Comment...tu t'es...faite ça...?"

A moi. De me sortir de cette merde, de faire en sorte de ne pas trop ramasser. Ce qui était difficile. Je décidais donc de commencer par qui. A cause de qui plus précisément.

" C'est de ma faute. Certaines blessures sont de moi, d'autres ... sont de Lewis Elster. Il vous a fait du mal, vous a blessé, a voulu vous tuez. Je voulais lui faire comprendre qu'il fallait qu'il s'arrête, qu'il fallait qu'il ne vous fasse plus de mal. Je l'ai attaqué ... Et j'ai pris une bonne correction. Je m'étais préparée, , je ne mentionnai pas ma double prise de drogue, et pourtant. A cause de ... ce pouvoir je me suis infligé les trois coupures. Et quand il m'a donné la chance de partir, je l'ai ignoré. Et j'ai continué à vouloir me battre. Comme une idiote. "

J'attendais donc l'ouragan. Qui allait déferler sur moi comme un raz-de-marée, emportant mes derniers lambeaux de fierté. J'étais stupide. Je regardai mes genoux, fuyant les prunelles bordeaux d'Ezio. Fuir, encore, comme une lâche. J'étais mal. Autant dans ma tête que sur le moment. Mais je ne devais pas pleurer, pas craquer. Ca faisait mal? De ta faute espèce d'andouille. Tu te sentais mal? De ta faute aussi idiote. Je ne récoltais que ce que je semais.

Messages : 340 Date d'inscription : 30/12/2010 Age : 30 Pseudo : Ninetales

- " C'est de ma faute. Certaines blessures sont de moi, d'autres ... sont de Lewis Elster. Il vous a fait du mal, vous a blessé, a voulu vous tuez. Je voulais lui faire comprendre qu'il fallait qu'il s'arrête, qu'il fallait qu'il ne vous fasse plus de mal. Je l'ai attaqué ... Et j'ai pris une bonne correction. Je m'étais préparée, et pourtant. A cause de ... ce pouvoir je me suis infligé les trois coupures. Et quand il m'a donné la chance de partir, je l'ai ignoré. Et j'ai continué à vouloir me battre. Comme une idiote. "
  
  Instant de silence.
  Heather avait son regard de glace, horrifié, posé sur Treize. Elle était allée se battre avec Lewis. N'avait-elle donc pas conscience de la dangerosité de ce type ? Et alors qu'elle posait tout ce qu'elle avait dans les mains à terre, la mafieuse eut un pressentiment, ce genre de murmure complice qui vous aide à anticiper. Elle s'interposa au moment précis où Ezio se levait de sa chaise, ses yeux bordeaux comme luminescents, et réussit à retenir ses bras pour ne pas qu'il mette une claque à sa petite-amie. Cependant, cela ne l'empêcha pas de hurler et de passer un savon à Treize.
  
  "TU T'ES ATTAQUEE A LEWIS ? C'EST QUOI, TON BUT, TE SUICIDER ?!
  - Ezio...
  - CE TYPE EST LA DANGEROSITE INCARNEE ! TU AURAIS PU TE FAIRE TUER !
  - Ezio ! Arrête de hurler ! "
  
  Le dénommé serra les dents à l'injonction d'Heather, mais tremblait encore, faisant des efforts pour contenir sa rage. Se libérant de l'étreinte de son amie aux yeux de glace, il approcha son visage de celui de Treize, plantant ses yeux bordeaux dans son regard bicolore, et lui envoya ses derniers murmures assassins, emplis de haine, de colère...provoquées par la peur.
  
  "Tu. Es. Une. Idiote. Pourquoi te mêler de ce qui ne te regarde pas ? Nous sommes assez grands pour gérer nos affaires tous seuls, Treize. Si tu étais morte, alors tu l'aurais bien mérité, et c'aurait été bien fait pour toi."
  
  La rage au ventre, Ezio saisit sa veste, son arme de secours, et sortit par la porte 706 en claquant violemment la porte derrière lui. Heather était restée immobile et au taquet, prête à intervenir si ça dégénérait, mais lorsque la tempête italienne se fut éloignée dans le couloir, elle sortit compresses et liquides de sa mallette à pharmacie. Tandis qu'elle imbibait une compresse de sérum physiologique, pour nettoyer les plaies, elle s'adressa à son tour à Treize.
  
  "Il avait mille fois raison, Treize."
  
  La voix de la jeune femme était neutre, puis elle saisit le bras de la yacii pour commencer à nettoyer les plaies.

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

Heather bougea, et attrapa Ezio au moment où il se levait. Il était furieux. Non sans raison, il fallait l'admettre. Il hurla, ses paroles suitant de rage et de haine. Ne pas pleurer. Rester droite. Mon regard restait rivé sur mes genoux. Heather lui demanda alors de se calmer, et il y eut une brêve accalmie. Avant qu'Ezio ne se plante devant moi, et qu'il plante son regard dans le mien. Ses prunelles bordeaux étaient assassines, haineuses. Je ne l'avais jamais vu comme ça.

"Tu. Es. Une. Idiote. Pourquoi te mêler de ce qui ne te regarde pas ? Nous sommes assez grands pour gérer nos affaires tous seuls, Treize. Si tu étais morte, alors tu l'aurais bien mérité, et c'aurait été bien fait pour toi."

Se retenir. Ne pas pleurer, car c'était de ta faute tout ça. Dans un mouvement de rage il se redressa, attrapa ses affaires et claqua la porte de la chambre. Ezio... Heather était restée là, prête à interrompre Ezio, à intervenir. Elle attendit un peu, et pris place devant moi, préparant des compresses. Plus calme que son ami, elle me dit:

"Il avait mille fois raison, Treize."

" Je sais. "

J'avais du mal à me rendre compte de la situation. J'étais comme déconnectée, emportée par les reproches de mon petit-ami. Son ton haineux, ses murmures. Tout était comme un coup de poing dans mon coeur. Je savais pourtant qu'il avait raison. Mais cela ne me faisait pas apprécier la situation pour autant. Je repensai à ce combat, et à ma défaite. Mais surtout à ce savon magistral. Comme on ne m'en avait jamais passé. J'étais triste, j'avais mal. Mais je l'avais plutôt bien cherché. Protéger. Etait-ce une fois encore une crise, ou tout simplement moi? Moi, Treize, et pas la Yacii? Dur de savoir. C'est de ça que j'ai peur. De ne pas savoir ce qui me conduit. Ma volonté de protéger les autres, ou cette force invisible, ancrée en moi? Cette chose qui me façonne, qui m'endurcit, qui me détruit, peu à peu.

" Tu l'avais déjà vu comme ça? "

Messages : 340 Date d'inscription : 30/12/2010 Age : 30 Pseudo : Ninetales

- " Je sais. Tu l'avais déjà vu comme ça? "
  
  Heather ne répondit pas tout de suite, un air toujours neutre sur le visage, concentrée sur le carré blanc tissé qui, trempé, commençait à virer sérieusement au rouge. Les ongles teintés d'hémoglobine, la mafieuse jeta la compresse dans la poubelle à côté du lit, et sortit une autre compresse, un bandage, et...un crayon de maquillage noir. Elle posa la compresse sur la plaie, enroula très fortement le bandage , et nota à côté l'heure. 17h56. Elle venait de faire un garrot, espérant arrêter l'hémorragie. Elle devrait le retirer dans cinq petites minutes. Et alors qu'elle bougeait légèrement, reprenant son matériel, pour s'occuper du deuxième bras, elle se décida à répondre après un léger soupir.
  
  "Oui. Une fois."
  
  Le jour où Clara était morte.
  Ce jour là, il avait plu. Enormément. Alors qu'ils s'enfuyaient, pourchassés par la police, un agent plus zélé ou plus fou que les autres avait tiré sur la mère d'Ezio. Une balle entre les deux yeux. La mort avait été immédiate. Le cri d'animal blessé de Luca était resté dans la tête d'Heather, lancinant, alors qu'elle avait l'impression de mourir elle-même. Et à cet instant, Fabio lui avait pris la main, et donné les clés de la voiture. Il lui avait murmuré en italien d'aller la chercher pour les sauver tous. Ils étaient partis, et étaient revenus dans la soirée. Le ciel s'était dégagé, et la scène de crime toujours là. Ezio, encore jeune adolescent, avait voulu échapper à l'étreinte de son père pour détruire les policiers.
  
  Il ne l'avait pas laissé faire.
  
  Alors il avait hurlé sa peine, sous le coup de la rage, en plein milieu de la rue, entre des torrents de larmes. Et les policiers présents n'avaient même pas essayé de les arrêter. Que l'on soit mafieux ou flic, on reste un humain. Et sans famille, l'homme seul reste dans le noir. Puis ils étaient repartis, abattus et tristes, écoutant d'un air mélancolique la radio.
  
  "Il a eu terriblement peur, Treize."
  
  Heather planta son regard de glace, presque blanc, dans les yeux bicolores de la jeune fille. Sa voix avait un léger ton de reproche, puis elle rabaissa ses yeux pour faire un deuxième garrot.

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

Heather serra un bandage autour de mon bras, et nota l'heure. Un garrot. Je regardai l'heure de plus près. Si tard déjà...? Heather allait s'occuper de l'autre bras, quand elle se décida à répondre entre deux soupirs.

"Oui. Une fois."

Seulement. Deux fois qu'il était en colère à ce point. Je ne demandai pas quand ni pourquoi. Pourquoi? Aucune idée. J'avais de la brume dans la tête, et une réelle difficulté à réfléchir. Heather était perdue dans ses pensées. Ses yeux de glace se balladaient dans un lointain souvenir.

"Il a eu terriblement peur, Treize."

Peur? Mais j'étais là, vivante, j'allais bien. Peut-être que je ne comprenais rien à rien. J'étais à côté de la plaque, comme souvent. Peur pour moi. Ils étaient les seuls désormais, qui savaient qui j'étais, qui me connaissaient un minimum. Et avec qui j'avais des liens. Ezio et Heather. Désormais ma seule famille.

" Je me sens mal de lui avoir fait ça. De lui avoir fait peur. "

La brume se dissipa un instant dans ma tête. Je me voyais, petite, lisant un livre dans le jardin de ma tutrice. Une sirène retentit dans la rue, et j'entendis que l'on criait mon nom. Treize! Treize viens! Mais je ne venais pas, ne comprenant pas pourquoi tout le monde hurlait dans la rue. Les enfants pleuraient. Yann se tenait sur le trottoir, de l'autre côté de la rue. Mon ami d'enfance. Sa chevelure blonde vénitienne lui tombait sur le front, et ses yeux gris étaient emplis d'inquiétude. Je me levai, passai sous la petite haie. Mais je n'eu pas le temps de le rejoindre. Une explosion retentit, et les premières personnes tombèrent. Et pour moi, le noir complet, après avoir vu Yann mourir. Sous mes yeux d'enfant.

Messages : 340 Date d'inscription : 30/12/2010 Age : 30 Pseudo : Ninetales

- " Je me sens mal de lui avoir fait ça. De lui avoir fait peur. "
  
  Heather ne répondit pas, et détacha les deux garrots. L'hémorragie avait cessé, aussi prit elle du Mercryl, efficace désinfectant transparent, et en étala-t-elle sur la plaie désormais propre. Après avoir effectué cette action, elle prit une compresse, des bandages et finit de soigner le bras gauche de Treize. Soudain, une goutte de sang tomba sur sa peau pâle, trempant le bord de sa chemise, et la mafieuse leva les yeux, s'apercevant que la victime saignait du nez. Elle alla alors chercher dans le frigo des glaçons, les mit dans un sachet plastique posé là par hasard, et les donna à la petite amie d'Ezio.
  
  "Mets ça sur ton nez et ton oeil. Ca te fera du bien."
  
  Puis elle continua les soins, toujours sans vraiment prêter d'attention.
  Je me sens mal.
  Je n'y peux rien, ma jolie.
  Heather ne pouvait s'empêcher de se dire que Treize l'avait bien cherché, et qu'elle devait désormais se débrouiller et assumer ses actes. Quand on prend une initiative, on doit s'attendre à tout, même à se planter, et à prendre les responsabilités de ses actions. Ainsi, alors qu'elle venait de finir de bander le deuxième bras, la jeune fille aux yeux de glace se leva, remettant ses cheveux en arrière, et s'adressa à la demoiselle.
  
  "Il reviendra. Et à ce moment là, fais tête basse et ne dis rien. Pas une excuse, pas un mot. Même pas un bonjour. Fais-toi oublier."
  
  Heather se remit à genoux, son matériel habituel dans les mains, et elle commença à nettoyer la coupure à la joue. Le nez cassé était hors de ses compétences, et elle devrait passer un coup de fil à Kasakov avant de faire quelque chose. Pour l'oeil au beurre noir, il n'y avait pas de secret...il faudrait attendre que ça passe. D'une voix neutre, comme toujours, la mafieuse eut juste une déclaration.
  
  "Il te pardonnera de lui-même."
  
  Laisse lui juste le temps de se calmer.

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

La mafieuse détacha les garrots. L'hémorragie était stoppée. Heather étala du désinfectant, et termina de soigner mon avant-bras. Je suivai tout ça sans vraiment le suivre, sans vraiment faire attention. Je la laissai faire, préférant ne plus rien dire. Voyant que je saignai encore du nez, Heather s'en alla chercher une poche de glaçons. Je la remerciai d'un signe de tête, et posai la glace sur mon nez. La sensation de froid me fit du bien, aussi je me calmai un peu. Heather continua de panser mes blessures, sans rien dire. Au bout d'un moment, la jeune femme s'adressa à moi:

"Il reviendra. Et à ce moment là, fais tête basse et ne dis rien. Pas une excuse, pas un mot. Même pas un bonjour. Fais-toi oublier."

J'acquiesçai. Je n'avais pas grand chose à dire. Heather s'agenouilla, et commença à nettoyer la coupure de ma joue. Encore une que je m'étais faîte. Comme la Yacii terriblement douée que j'étais. Toujours d'une voix neutre, Heather déclara:

"Il te pardonnera de lui-même."

Je ne pouvai rien faire, en d'autres termes. Il fallait que je laisse Ezio se calmer, que je lui laisse le temps. Je savais au moins une chose. Jamais plus je ne m'attaquerai à Lewis. C'était risqué pour moi, d'une parce qu'il y avait Lewis d'un côté ... et mon petit ami de l'autre.

" Merci. "

Je me reperdis dans l'abîme de mes pensées. Je me voyais, enfin éveillée. Les cadavres tout autour de moi, et surtout cette horrible sensation d'avoir eu de la chance. D'être la seule à avoir eu de la chance. Premiers sanglots, en voyant Yann, inerte de l'autre côté de la route. Je sortai de dessous la haie, et me précipitai sur son corps, en hurlant son nom. Et voyant que je ne pouvais rien faire, je le laissai. Je retournais dans l'appartement, et vit ma tutrice, morte également. Désespoir de ceux qui restent. Liberté de celui qui part. Je me voyais, pleurant toutes les larmes de mon corps, ne bougeant presque plus. Et j'étais restée comme ça, longtemps. Jusqu'au jour où les ramasseurs arrivèrent. Le jour où il n'y eut plus aucun cadavre dans Nightfield.

Messages : 340 Date d'inscription : 30/12/2010 Age : 30 Pseudo : Ninetales

- " Merci. "
  
  Heather leva les yeux vers Treize, qui semblait perdue dans ses souvenirs, ses prunelles bicolores terne et perdu dans le vague. La mafieuse se demanda un instant si cette étincelle au coin du regard était pour les larmes ou pour une quelconque rage. La yacii affichait une expression tellement triste...ce ne pouvait être la perspective de s'être faite engueuler par Ezio, si ? A moins qu'elle ait des souvenirs tristes, comme la majorité des gens dans ce monde. Finissant de soigner les coupures, Heather se leva et récupéra son téléphone portable posé à côté.
  
  "Je reviens dans une seconde."
  
  La mafieuse attrapa la carte de visite posée à côté de la porte, et composa le numéro du docteur Kasakov. Elle s'y connaissait en premier secours, mais les fractures du nez, c'était carrément hors de ses compétences. Alors, elle colla l'appareil à son oreille et attendit que son interlocuteur décroche.
  
  "Docteur Igor Kasakov, j'écoute ?
  -Bonjour, Docteur. Heather Rosary à l'appareil.
  -Oh, mademoiselle Rosary! Vos visions vont mieux ?
  -Oui, elle disparaissent progressivement. Cependant, j'aurais besoin de vos conseils pour une autre affaire.
  -Je vous écoute.
  -Une...connaissance s'est battue, et est revenue avec le nez en sang. Il n'est pas tordu, juste un peu rouge et gonflé, mais il lui fait mal. Que pourrais-je faire ?
  -Cela signifie que seul le cartilage a été touché. Dans ce cas, le nez se réparera tout seul, il faudra juste faire très attention et éviter tout choc. Et surtout, appliquez de la glace à chaque douleur.
  -Merci beaucoup, Docteur. Au revoir !
  Au revoir, mademoiselle Rosary."
  
  La jeune fille aux cheveux noirs raccrocha, et retourna devant Treize. Elle mit du sérum physiologique sur une compresse, et retira la poche de glace pour nettoyer le visage de la blessée. Après plusieurs passages en douceur, Heather parvint à retirer toute trace de sang, et rendit le sac de glace à la petite-amie d'Ezio avant de commencer à tout ranger dans la mallette à pharmacie. Elle la referma dans un claquement, alla la remettre au fond du placard, puis revint vers la jeune femme aux cheveux châtains.
  
  "Le cartilage de ton nez est abîmé, mais si tu n'y touches pas et qu'il n'y a pas d'autres chocs, tu devrais t'en sortir sans séquelles."
  
  Silence, puis Heather reprit en montrant le lit sur lequel était assis Treize.
  
  "Repose-toi, maintenant."
  
  Ou ces moments où l'impératif mêle ordre et conseil.

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

Heather termina de soigner les coupures, attrapa son portable et s'excusa. Elle s'éloigna, et composa un numéro qui se trouvait sur une carte de visite. Je ne comprenais pas grand chose à la conversation, car Heather était trop loin, et parce que je n'entendais pas son interlocuteur. Je me contentai de penser.

Je me voyais, après le passage des ramasseurs. Nightfield était vide. Cette ville, autrefois si belle, si peuplée, n'était plus que ruines et mendiants. Moi je volais. Je volais un pain à celui qui en avait deux, jugeant que c'était une attitude logique. Et j'étais seule. Cet appartement rempli de souvenirs... C'était insoutenable. Je finis par partir. Ne plus rester là, m'enfuir. J'étais jeune. Je partis donc pour un autre endroit de la Skyline, et trouvait l'appartement que j'occupe toujours aujourd'hui.

Ce fut Heather qui me fit émerger de mes pensées. Elle acheva de nettoyer mon visage, et fila ranger la saccoche. J'entendis l'armoire à pharmacie se fermer, et des bruits de pas. Heather se planta devant moi, et expliqua:

"Le cartilage de ton nez est abîmé, mais si tu n'y touches pas et qu'il n'y a pas d'autres chocs, tu devrais t'en sortir sans séquelles."

Puis elle désigna le lit.
"Repose-toi, maintenant."

L'étrange concept de conseil rude, ou d'ordre doux. Pour Heather, je penchai plus pour le conseil rude. Je la remerciai, puis m'allongeai. Je pris conscience que j'étais épuisée. Enfin, je le savais, mais ne m'en était pas vraiment souciée. J'avais retiré mes baskets, et m'était installée en chien de fusil sous la couette. C'est un avantage quand on est petit, on peut se mettre partout. J'étais contre le mur quasiment, ne prenant même pas la moitié du lit. Mais j'étais bien. Dans la mesure du possible, avec mes blessures, et le savon que m'avait passé Ezio. La poche de glace calée entre mon nez et ma main, je ne mis pas de temps à m'endormir. Et à replonger dans cet étrange cauchemard.

J'étais dans le noir, encore et toujours. Comme si il n'y avait pas de décor. J'étais seule, il n'y avait pas le moindre bruit. Pas même celui de mes pas. La sensation que quelque chose me recouvrait était étrange, comme je ne distingais rien d'autre que moi. Une couette. C'était la seule chose qui me rapellait que j'étais dans un lit. Du moins que mon corps y était. Mon esprit lui, était ailleurs. J'avançai, ne craignant pas de me cogner. Car il n'y avait plus de douleur, mes blessures ne me faisaient rien. Je n'avais pas mal. Au final je m'asseyai. Et pensai, seule dans le noir.

Je m'étais faîte à ma nouvelle vie. Avec l'aisance d'un poisson dans l'eau, je m'étais forgé une nouvelle existance. Jusqu'a ce jour, où je su que j'étais une Yacii. Des hurlements retentissaient, des hurlements de terreur. Un jeune femme. J'avais couru, suivant mon instinct et les cris. Et je l'avais vue, un homme tentant de la violer. J'avais couru, et poignardé l'homme. Tout c'était passé si vite. Il était à peine blessé, et j'avais donné un autre coup. Et tenté de le protéger au même instant. Je m'étais entaillé la main, et lui m'avait poignardée à l'épaule. La jeune femme était sauve. Et lui s'était enfui.

Messages : 340 Date d'inscription : 30/12/2010 Age : 30 Pseudo : Ninetales

- Sans protester, Treize s'exécuta.
  
  Satisfaite de la voir se reposer, couchée en chien de fusil, la poche de glace appuyée contre son oeil et son nez, Heather retourna dans la chambre 707, écartant le rideau qui servait de protection et de limite de territoire entre son coin et celui d'Ezio. Se jetant sur le lit, la mafieuse reprit son roman italien, et se replongea dans une lecture qui lui demandait une certaine concentration. Elle resta ainsi dans un silence quasi-parfait, troublé uniquement par la trotteuse de l'horloge accrochée au mur. Soudain, les clés tournèrent dans la serrure de la pièce à côté, et elle leva les yeux pour tenter de croiser le regard d'Ezio. Elle voulait lui parler.
  
  L'italien, calmé, rentra dans la chambre en fermant doucement la porte derrière lui. Par la fenêtre, on distinguait le soleil qui commençait sa descente dans un ciel enflammé, tentant de se masquer au regard humain derrière la ligne de gratte-ciels. Il baissa ses iris bordeaux sur la forme roulée en boule dans son lit, et ne dit pas un mot. Il retira sa veste, ne gardant que sa chemise froissée, et alla dans la chambre mitoyenne où Heather le regardait avec ses yeux perçant couleur de glace. Ezio s'approcha du lit, s'assit dessus, tournant le dos à son amie, puis parla.
  
  "Tu vas m'engueuler en me disant que j'ai eu tort de lui hurler dessus?
  -Non. Tout simplement car tu avais raison. Elle s'est comportée comme une idiote. En revanche..."
  
  Heather s'assit à côté d'Ezio, et lui mit une gifle bien placée. Un sourire triste aux lèvres, la mafieuse expliqua son geste.
  
  "Ne claque pas la porte aussi violemment. Ta serrure est déjà abimée."
  
  Un instant interdit, Ezio éclata de rire, suivi par Heather, puis retourna dans sa chambre avec un sourire complice. Il regarda Treize, toujours allongée, puis observa un instant par la fenêtre. Incandescent, le ciel se teintait peu à peu d'un rose bleuté. Alors, jetant ton canif dans un coin de la pièce, le jeune homme s'allongea sur son lit, mettant ses bras autour de Treize, en prenant garde à ne pas toucher à ses blessures.
  
  La nuit ne tarderait plus.

Messages : 102 Date d'inscription : 30/06/2011 Pseudo : Shane-Hinayu

Dans le noir, des sons me parvirent. Beaucoup de sons différents. D'abord, un bruit de ressorts. Comme ceux des lits. Puis, un cliquetis. Et une porte qui claque. Bruits feutrés, et nouveau bruit de ressorts. Puis des voix. Claquement, moins fort. Voix. Puis des rires. Puis, plus aucun bruit. J'étais de nouveau seule, dans le noir le plus complet. La solitude ne me dérangeait pas. C'était cette impression d'étouffer, cette sensation que l'air était épais. Et cette sensation horrible, comme si le noir cherchait à me compresser. Il y eut de nouveaux bruits de ressorts. Puis quelque chose m'entoura, m'enlaça. J'avais peur. Que ce soit le noir. Que ce soit cette obscurité, qui voulait me briser, là maintenant.

Je m'allongeai, toujours toute seule dans le noir. En prenant conscience que tous ces bruits ne venaient pas de mon cauchemard. Et que cette sensation que l'on m'enlaçais... ce n'était pas l'obscurité, ce n'était pas dû à ma phobie. Il fallait simplement d'ouvrir les yeux. Mais pas toute suite. Je voulais penser, encore un peu.

Ce fameux jour, où j'avais rencontré Ezio. De façon brutale, certes, mais je l'avais rencontré. Il pleuvait, et je venais d'acheter ma drogue. Toutes mes économies du mois, envolées dans cette substance, illicite ailleurs. Commune à Nightfield. J'en avais pris, troublant mes sens par la même occasion. Et l'accident était arrivé. J'avais été percutée par Heather. Et j'avais rencontré Ezio.

J'étais encore dans le noir. Il était peut-être temps d'ouvrir les yeux. La lumière était plus faible que tout à l'heure. Le soleil était couché. J'avais donc dormi si longtemps? Les bras d'Ezio m'entouraient, sans toucher mes blessures. La poche de glace était presque fondue dans ma main. Heureusement, elle était fermée. Je ne souriais pas pour autant. Etait-il encore fâché contre moi? Sans doute. Plus ou moins que tout à l'heure? Il fallait demander. Mais je ne pouvais pas. Je devais faire profil bas. Je restais donc silencieuse, blottie contre lui. Les yeux toujours fixés sur le mur devant moi.

Mistake. | Heather

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